Organiser et vivre un atelier multi-âge et multi-disciplinaire
- 1 janv.
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 10 mai
Que pensez-vous de l’apprentissage en groupe ?
Si la question de la socialisation est un enjeu lorsque l’on mentionne l’éducation à la maison, elle n’est pour nous qu’une composante naturelle du “vivre-ensemble”.
Apprendre ensemble devient alors une évidence.
Je crois fermement qu’apprendre en groupe ouvre d’autres opportunités et favorise un enrichissement de l’expérience éducative.
Coopération, communication, ouverture à l’autre, motivation… Nombreux en sont les avantages.
Alors, comment faire concrètement ?
Au cours de cet article, laissez-moi vous emporter pas à pas au fil de mes réflexions, de l’organisation et du vécu d’un atelier multi-âge et multi-disciplinaire entre quatre étapes : la formation du groupe, le choix du thème, la préparation du matériel et des activités et l’animation de l’atelier.
Former un groupe
Depuis que mes enfants sont très jeunes, je (co-)organise des rencontres informelles quelques fois par mois, des activités hebdomadaires, des rencontres en ligne pendant la pandémie ou encore des ateliers thématiques récurrents.
Actuellement, mes enfants participent à des ateliers multidisciplinaires qui s’étalent sur l’année scolaire, à raison de 3 ateliers par mois, d’environ 2h. Chaque mère-éducatrice prend en charge un atelier par mois, pour un groupe de 6 enfants de 8 à 12 ans.
L’animation, le choix des ressources, la porte d’entrée dans le thème… Chacune des mères part de l'idée initiale pour y apporter ses propres couleurs.
Choisir un thème
J’aime l’idée d’avoir une thématique qui sert de fil conducteur pour plusieurs ateliers, ce qui permet de l’explorer selon plusieurs angles : historique, scientifique, littéraire, etc.
À l’inverse, il peut s’agir de choisir une matière scolaire et de proposer plusieurs activités. Par exemple, il y a quelques années, mes enfants participaient à un club de mathématiques proposant diverses activités, du jeu à la résolution d’énigmes en groupe.
Offrir un projet ouvert est aussi une option laissant l’opportunité aux enfants de proposer des idées et de construire ensemble leur thème.
Le thème de nos ateliers de cette année est l’exploration des cinq continents à partir de l’anglais, l’écriture, la lecture, l’art, la cuisine et la géographie.
Préparer le matériel et les activités
Chacun de mes ateliers explore donc un continent à partir de la lecture, de la géographie et de l’art, les autres matières étant abordées par les autres mamans.
Je fournis les livres à lire quelques semaines à l’avance et les familles se les échangent jusqu’au jour de l’activité.
Pour l’atelier sur le continent africain, les titres choisis étaient :
La peur de l’eau, de Dominique Mwankumi
Le numéro Nil de la revue Tétraslire
Le numéro Maroc du magazine Baïka
Je m’assure que les livres soient de niveau de lecture différents afin d’offrir des défis de lecture aux enfants qui le souhaitent tandis que d’autres vont plutôt choisir de se faire lire le livre par leur parent.
Je prépare ensuite du matériel pour le jour J, tout en gardant une grande flexibilité pour m’adapter à “l’énergie” de ce jour-là :
Des atlas en nombre suffisant pour chaque enfant ou groupe de 2 enfants
Le livre La France et les grandes divisions du monde de Charlotte Mason
Le matériel d’art : peinture aquarelle, pastels gras, crayons de couleur, feutres, papier pour peinture, ciseaux, colle
Le matériel divers : post-it, stylos, crayons effaçables, gomme, papier de brouillon

Animer l’atelier
Activité 1 - autour de la lecture
Je commence par une discussion de groupe, en format “club de lecture”. J’aime que nous soyons toutes et tous assis en cercle, par terre sur le tapis du salon, entourés de nos livres, nos chats et en faisant une place à mon enfant de 2 ans pour qu’il participe à sa hauteur en tenant les livres ou en commentant les images.

Chaque enfant est invité à choisir un livre et nous raconter ce qu’il a lu, ce qu’il a appris, ce qu’il a aimé, ce qu’il n’a pas aimé. Plus simplement, nous “parler” de ce livre.
Je reprends quelques principes de la narration orale de la pédagogie Charlotte Mason où l’on laisse l’enfant raconter ce qu’il se souvient, dans l’ordre qu’il souhaite, sans l’interrompre et en lui laissant le temps de s’exprimer.
Je pose parfois des questions pour faciliter la narration lorsque l’enfant ne sait pas par où commencer, souvent pour les plus jeunes.
Chacun.e est ensuite invité.e à rajouter ce que lui oui elle a retenu et qui n’a pas été cité et souligner ou nuancer ce qui a été présenté. Ce moment prend la forme d’une discussion-débat. Ce n’est pas un cours magistral, ce n’est pas une évaluation.
Certains enfants sont plus intéressés ou sensibles à certains passages, d'autres n'aiment pas le livre choisi ou, au contraire, l’adorent. L’espace de discussion permet d'expérimenter la diversité des opinions et de les exprimer dans un contexte privilégié.
Notez que je ne cherche pas à évaluer la lecture, les connaissances acquises ou la compréhension des textes. Je pense que ce sont des aspects qui se développent petit à petit et naturellement lorsqu’un enfant est en contact avec la littérature, au cours de discussions et lorsque l’intérêt est présent.
Activité 2 - autour de la géographie
La deuxième activité prend une forme interactive où j’utilise des passages du chapitre sur le continent africain du livre de Charlotte Mason. Chaque chapitre débute par une série de questions qui permet de se “promener” dans le continent : “quelle est la chaîne de montagne de l’Afrique du Nord ?” ou “cite 3 pays d’Afrique sub-saharienne”.
Les enfants s’entraident, explorent les cartes, se trompent, repèrent les océans ou les mers, les zones désertiques ou tropicales, lisent les noms nouveaux de pays, de villes, situent des éléments par rapport aux points cardinaux, comparent les informations dans les différents atlas et… apprennent.
Ils apprennent à tenir compte des connaissances des autres, se divisent la carte pour localiser un point d’intérêt, se rappellent où est l’ouest, repèrent les différentes zones géographiques et développent leur compréhension des notions de taille, de distance et de position relative.
Je leur propose ensuite de regarder la carte du continent avec toute leur attention puis de fermer les yeux.
“Pouvez-vous visualiser chacun des contours du continent ?” Si non, ouvrez les yeux et observez la portion manquante et recommencez jusqu’à ce que vous puissiez vous représenter la forme du continent avec vos yeux fermés.
Les atlas fermés, chacun.s est ensuite invité à esquisser les contours et les proportions du continent puis d’observer les différences entre tous les dessins ainsi créés.
S'ensuit la lecture du chapitre.
J’adapte ou ignore quelques passages que je ne trouve pas appropriés. Parfois, un thème historique ou géographique attire notre attention alors la discussion reprend et les cartes sont explorées à nouveau.
La lecture permet d’approfondir le vocabulaire géographique : pays, climat, ligne parallèle, rivière ou fleuve, golfe, frontière, etc. J’encourage les enfants à se créer leurs propres définitions de ses éléments à partir des discussions et du texte, tout en veillant à rectifier les erreurs.
La notion de lignes parallèles attire l’attention, la différence entre latitude et longitude vient alors combler le besoin de connaissance de certains enfants. Je propose de mesurer en degré la taille du continent africain en longueur et en largeur. Les atlas sont une ressource précieuse pour localiser les degrés de latitude et de longitude. Les mathématiques s’invitent et une soustraction nous donne le résultat.
On ne sait pas vraiment quoi penser de ce chiffre, je garde en tête de le reproduire l’expérience lors de l’étude du prochain continent pour pouvoir le comparer.
Activité 3 - autour de l’art
La 3e et dernière proposition est d’utiliser le matériel artistique à disposition pour créer leur propre représentation du continent africain. Cette fois-ci, les atlas peuvent rester ouverts !

Pendant la réalisation, nous listons les différents types d’éléments géographiques que nous avons découverts ou observés. Ont été nommés : les pays, le climat, le continent, les lignes parallèles, les mers, les fleuves, les océans, les îles, les montagnes, le golfe et le désert.
Je propose que chacune des créations comprennent au moins un élément de chaque type. Chacun se remémore à quoi font référence ces différents termes et s’appuie sur les atlas pour en trouver un exemple à placer sur sa création.
L’atelier arrive à sa fin, les estomacs se réveillent et l’envie de jouer librement aussi. Les enfants poursuivront leurs réalisations chez eux, s’ils le souhaitent.

À partir d’une même structure lecture-géographie-art, chaque atelier s’avère finalement différent et laisse la place à l’émergence d'idées, de la créativité et l’acquisition de connaissances diverses.
Cette approche structurante permet d’utiliser la force du groupe pour développer ou ancrer les connaissances, sans forcer l’apprentissage d’un contenu spécifique. Par ailleurs, combiner plusieurs pratiques, littéraire, visuelle, artistique, auditive, permet de rejoindre les profils d’apprentissage de chacun des enfants du groupe et de multiplier l’exposition au contenu.
Finalement, peut-être que ma fille aura intégré pleinement les différentes zones climatiques du continent africain tandis que mon fils aura plutôt compris la notion de lignes parallèles. Mais ces nouveaux savoirs seront significatifs.
Et, tout ceci, grâce à la dynamique de groupe.










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